Marcher ensemble

Eh bien, après quelques semaines de marche, voilà que j'ai un compagnon de marche. Je le rejoins quelques kilomètres après mon départ de Rocamadour. sans l'avoir rencontré ce matin, je devine qu'il a dormi comme moi au Cantou à Rocamadour.
Marcher ensemble n'est pas si simple. Se pose immédiatement, même après mes semaines solitaires, la question du désir d'être seul et celle de consentir ou pas un peu de compagnie. Soyons clairs, il vaut mieux parfois être seul que mal accompagné ! C'est ainsi. Mon vis à vis, Arnaud,  me dira au bout de quelques temps d'apprivoisement qu'il en est de même pour lui. La relation, la conversation, peuvent couper du silence que l'on désire au fond ! Finalement ce sont donc nos deux solitudes assumées qui se rencontrent ce jour,prudentes, puis au fil du jour plus profondes. Des oscillations entre échanges et silences assumés, ou suggérés intuitivement.
Arnaud est passionné de radiesthésie, de vibrations, de lignes telluriques. De ces domaines il fait usage dans sa pratique médicale alternative. Une journée d'apprentissage, de découverte. Une journée, peu à peu aussi, à s'en dire bien plus sur les raisons raisonnées et irraisonnées qui nous mettent sur le chemin, qui nous mettent en chemin.
Et le temps de se dire, de se dévoiler, vient avec le respect ressenti dans l'écoute et la parole de l'autre .  Ainsi va souvent le jour pèlerin. De la rencontre prudente aux échanges profonds, tendus mais libres d'un jour qui accueille sans engager, et sans contraindre, non plus. Parole libre parce qu'elle n'est pas du même temps, de la même tension que celles de nos quotidiens ? Libre parce qu'elle prend le temps de se penser, de se construire pas à pas, dans le rythme hypnotique de la marche? Libre autant que déliée par l'extension de la temporalité dans la marche lente du jour ?
Ce sont toutes les questions ouvertes au soir d'une rencontre, rencontre que notre circuit commun devrait prolonger demain.